Pour un décryptage pertinent et impertinent

L’édito

Z

Dans les dernières heures du mercredi 28 mai, l'Assemblée nationale enterrait les ZFE en confirmant leurs suppressions par un vote de 98 contre 51. La maquette de ce projet, vertueuse dans son imaginaire, n'est guère parvenue à convaincre, une fois confrontée au pragmatisme cruel du principe de réalité. Si la loi Climat et Résilience est visionnaire et pavée de bonnes intentions, la mise en chantier de ses ambitions bute parfois devant l'autel du timing économique et social. 

Dans ce dossier, chacun s'empourpre à raison mais avec de mauvais arguments. La droite de son côté, aime à stigmatiser les populations péri-urbaines, à ses yeux forcément défavorisées et équipées de véhicules obsolètes, pointant du doigt les clivages sociaux et une lutte des classes manichéenne, ou les plus fragiles vivraient aux périphéries des villes, en opposition à des classes favorisées, demeurant dans les centres-villes et moins concernées par les enjeux climatiques et sociaux liés aux mobilités. La gauche, quant à elle, a sans doute privilégié l'angélisme idéologique à la mise en œuvre, tentant de passer en force en accélérant le processus des transitions. 

Le retrait de cette loi ZFE n'est pourtant qu'un recul momentané quant au sujet de la place de l'automobile dans l'espace urbain. Car si la sphère politique a pêché sur les aspects pédagogiques et sur la concertation, la machine vertueuse des mobilités douces et alternatives est en route depuis bien longtemps à l'exemple de notre territoire ou le Conseil Départemental n'a pas attendu que cette thématique soit à la mode pour assurer une couverture totale du département avec son réseau Trans Isère et ou le SMMAG œuvre avec l'unification d'un réseau qui permet de voyager sans encombre, bien au-delà des communes métropolitaines, du bout du Pays Voironnais aux tréfonds du Grésivaudan.

Ce retrait, souhaité par les Français et entériné par les députés, montre également que la démocratie fonctionne et que la république n'est pas systématiquement frappée de la surdité qu'on lui prête. Prochaine étape, le ZAN (Zéro artificialisation nette) dont même l'intitulé n'est pas perceptible à la compréhension de tous et dont il est à parier qu'il pourrait connaitre, dans les mois à venir, un sort tout aussi funeste. 

Sébastien Mittelberger

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PARANORMAL ACTIVITY
Les élus LFI de la majorité municipale de Grenoble indiquent par voie de presse leur intention de sommer Eric Piolle de rompre le jumelage entre Grenoble et Réhovot. Une injonction qui peut faire exploser Grenoble En Commun et faire émerger une rupture définitive entre les élus LFI et le reste de ce qui compose la planète Piolle.
C’est par un communiqué diffusé par le Dauphiné libéré et commenté par Ève Moulinier que nous apprenons aujourd’hui la volonté d’élus LFI de la majorité municipale de Grenoble « d’en finir avec le jumelage Grenoble-Rehovot et la normalisation des relations avec un état génocidaire ». Un communiqué signé, comme le fait habilement remarquer notre consœur, de cette façon : « les élus La France Insoumise de la Municipalité de Grenoble, mais sans le détail des noms ».  Story board Ce jumelage entre la capitale des Alpes et la ville israélienne existait bien avant l’arrivée d’Éric Piolle aux destinées grenobloises mais n'avait jamais été véritablement actif. Et si quelques élus de l'ADES, Gilles Kuntz en tête avaient demandé une suspension de ce jumelage, dès 2009, Michel Destot, alors maire de Grenoble, n'avait pas donné suite. Notons que ce jumelage, comme bien d'autres, en dehors de l'apparence, demeurait une coquille vide, sans actions ni liens particuliers. Eric Piolle, fin politique, réactivait donc fin 2023 un jumelage inerte qui n'avait jamais été suspendu pour en faire un objet actif et engagé mais tout aussi inerte puisque depuis l'annonce de reprise de ce jumelage, aucune action significative n'a été menée vis à vis de Herovot. Dans cette séquence, le fond important peu tant la forme est capitale. Compte tenu du contexte international lié aux événements du 7 octobre 2023 et de son retentissement en chacun d’entre nous, la décision d’Éric Piolle ne pouvait être qu’à porter à son crédit et s’il est vraisemblable que ce souhait a fait l’objet d’un consensus au sein de sa majorité municipale, au travers de son groupe Grenoble en Commun, il est probable que les membres LFI en place boulevard Jean Pain ont dû se pincer et retenir un haut le cœur à ce moment précis. Car déjà se mettait en place chez nombre d’entre eux un positionnement clairement pro Palestinien au dessein de revisiter l’histoire au point de nommer « offensive du Hamas du 7 octobre » un attentat meurtrier contre des civils innocents, perpétré par le Hamas, massacrant hélas sans le moindre aveuglément tout ce qui se trouvait à leur portée assassine, sans distinction de genre ou d’âge pour le seul motif qu’ils étaient juifs.  Les élus LFI grenoblois, alignés sur leurs collègues nationaux, ne ratant jamais une occasion de montrer leur camp choisis et en creux, sous la justification de dénoncer la politique de Benjamin Netanyahou, de pointer un antisionisme de salon, arbre courtois cachant à peine un antisémitisme virulent. Éric Piolle, quant à lui exprimait à l’époque : « A Grenoble, nous sommes les amis du peuple israélien, nous sommes les amis du peuple palestinien, nous croyons à la paix » L’humeur Mossad Dans cette nouvelle séquence, il est curieux d’observer cet amalgame qui consiste à confondre villes et nations. Si Rehovot est montrée du doigt, que dire du jumelage avec Constantine, ville algérienne ou la démocratie semble perfectible. Que dire du jumelage avec Phoenix, ville américaine sous administration Trump, président moins que modérément apprécié par les élus de la majorité Grenobloise. Curieux également de considérer le comportement des élus LFI de la majorité municipale, faisant fi de la cohésion de feu Grenoble en Commun et s’émancipant publiquement en sommant Eric Piolle d’obtempérer à leur requête. Curieux encore le mutisme des autres élus de la majorité, ADES ou EELV. En accord avec LFI ? Consultés ? Réduits au silence ? Autres temps… Si l’évidence des calendriers admet sans querelles que 2025 n’est plus 2023, à Grenoble, l’agenda de 2024, chargé de son cortège de tensions à défaut de gloires, en plus de la perception, désormais visible de l’échéance des municipales de 2026 à certainement participé à l’isolement politique d’Éric Piolle au sein de sa majorité, originellement protéiforme, naturellement régicide quand pointe les fins de règnes.  Autres mœurs. C’est un secret pour personne, Éric Piolle ne se représentera pas pour un troisième mandat comme maire de Grenoble, pas plus qu’il ne briguera la présidence de la Métropole, le match perdu contre Christophe Ferrari ayant laissé des plaies dans la majorité municipale, certaines encore béantes. En ne se représentant pas, si l’actuel maire de Grenoble a ouvert une boite de Pandore, la question qu’il n’est pas inutile de se poser étant de savoir s’il en a la maitrise ou si cette boite est déjà hors de contrôle.   Saint Barthélemy Festival Jusque-là, il était pensable qu’Éric Piolle tenait les manettes de sa succession. La promotion d’un triptyque de cheffes de file. Laurence Ruffin, mystérieuse, subtilement et implicitement en tête de cet édifice. Presque aucune communication, une présence habile sur certains événements, la presque tête de liste, non déclarée, mais désignée dauphine de l’actuel maire de Grenoble par les imaginaires des observateurs, promène son élégante silhouette énigmatique dans une tonalité plus proche de Belphégor que de Lucie Castet, elle-même en son temps, brève souveraine sans royaume.  Mais les faits sont têtus et obstinés et la victoire récente d’Éric Piolle au sein d’EELV n’était peut-être qu’une victoire à la Pyrrhus puisque moins de deux semaines après son accession au poste de porte-parole des Verts, Médiapart venait gâcher la fête en publiant un article rappelant les possibles ennuis judiciaires auxquels le maire de Grenoble devra être confronté un jour ou l’autre. Si à ce stade l’agenda judiciaire d’Éric Piolle est entre les mains du procureur de Valence, il est probable que cette séquence jouera un rôle dans le poids qu’Éric Piolle pèsera dans la campagne. Il est tout aussi probable que certains membres de sa majorité, alléchés par le gout du sang, aiguisent leurs lames dans la lumière tamisée des bureaux de l’hôtel de ville. Pour première preuve, la déclaration du jour, cette injonction faite au maire de Grenoble de renoncer au jumelage d’avec Rehovot avec pour Dead line le prochain conseil municipal du 26 juin.  Et pour seconde preuve, ce deuxième communiqué, tombant une heure seulement après le précédent, celui-là indiquant qu’Élisa Martin, députée de la troisième circonscription et Allan Brunon, militant lyonnais seront les chefs de file Insoumis pour les élections municipales grenobloises de 2026. Dead or Alive Mais alors, quelle va être la réaction d’Éric Piolle en amont ou lors de ce prochain conseil municipal ? S’il se plie à la volonté de LFI, cette décision sera considérée comme démissionnaire et l’allégeance à l’endroit de LFI ne fera plus aucun doute, ce qui ne manquera pas de perturber le mouvement piloté à date par Lucille Lheureux, Margot Belair et Laurence Ruffin.  S’il refuse de céder, comme il en est coutumier, ça sera la guerre avec les élus LFI qui feront exploser l’unité cabossée mais jusque-là préservée de Grenoble En Commun au dessein de constituer un groupe autonome et de viser la municipale de 2026 en solo, en rupture totale avec ce que fût l’aventure de 2014. Un contexte qui aura obligatoirement des conséquences majeures quant à la représentation de la ville centre à la métropole.  De William Shakespeare à Edgar Poe Au bénéfice du doute à l’endroit du maire de Grenoble, quant à le soupçonner de faire partie de cette nouvelle stratégie et d’être le commanditaire de ce qui ne tardera pas de devenir une boucherie, au moment où le navire tangue, à l’instant où Éric Piolle, détenteur incontesté de l’intuition de 2014, de cette possibilité d’une ile ou l’écologie partirait des villes, peinant chaque jour à être ce roi Lear, tentant de répartir l’héritage entre ses filles devenues haineuses et assoiffées pour finalement devenir Roderick Usher, témoin principal d’une folie collective dont l’énergie de la souffrance détruira la maison qui jusque-là le protégeait. En ces jours du printemps 2025, Éric Piolle ferait bonne idée de s’amuser avec gourmandise des prises de paroles des membres de l’opposition, finalement dans leurs rôles et dont les rancœurs ne sont rien au côté des sentiments développées par ce qui fût sa famille politique, car ses véritables ennemis se situeront pour la plupart dans ce camp qui est encore le sien et qui donne écho à l’aphorisme d’Hervé Bazin :  « Ou est-on mieux qu’au sein de sa famille ? Partout ailleurs ! ».