Pour un décryptage pertinent et impertinent

L’édito

SARKO PHAGE

Dimanche, alors que des montes en l’air matinaux procédaient au cambriolage de joyaux au premier étage du musée du Louvre, les chaines d’informations s’interrogeaient de savoir si ce larcin humiliait la France. A savoir si les yeux du monde étaient rivés à nos frontières pour évaluer le niveau de dignité que conservait notre pays au sortir de ce fâcheux fric-frac. Un drôle de dimanche donc, ou s’ourdissait par avance une honte nationale qui celle-là humilie la France, de son intérieur comme à son extérieur. A l’heure ou ses lignes s’écrivent, Nicolas Sarkozy est incarcéré à la prison de la Santé. Sans revenir précisément sur les raisons qui l’ont conduit ici, alors que pourtant chacun valide le fait que ce dernier n’est ni coupable d’enrichissement personnel ni du chef d’inculpation de corruption, Nicolas Sarkozy, 70 ans, ancien Président de la République d’une des plus grandes puissances mondiales de près de 70 millions d’habitants et momentanément celui de l’Europe, dormira ce soir en prison. Il n’est pas question ici de départager ses détracteurs de ses admirateurs. Chacun des deux camps ayant de bonnes raisons de croire en leurs arguments. Il est question de crier que non, un Président de la République n’est pas un justiciable comme les autres et que le sort qui peut lui être réservé ne doit pas, ne peut pas, être celui d’un mortel ordinaire.  Mais cette incarcération arbitraire illustre d’autres gravités. Celle d’une justice métastasée par l’hystérie régicide de nombreuses de ses composantes. Une justice qui peine et souvent renonce à expulser quelconque OQTF mais s’autorise à embastiller un ancien chef d’état. Celle d’un pays silencieux, à l’intérieur duquel aucun Conseil d’État, aucun Conseil Constitutionnel, aucune Assemblée nationale, aucun Sénat ne soit en mesure d’empêcher un affront qui, au-delà de Nicolas Sarkozy, est une humiliation pour la fonction, pour la démocratie, pour la république, pour la France. Celle d’un peuple sophistiqué, à qui il est tentant de rappeler, quand il se réjouit du bucher, que le « normal » ne fait guère bon ménage avec le providentiel et que la mise en détention d’un ancien chef d’état fait plus appel à la mémoire de Marat et de Robespierre qu’a celle de Rousseau et de Voltaire. Nicolas Sarkozy dort ce soir en prison. Si la foule n’est pas le peuple, il est à déplorer qu’aucune foule comme aucun peuple ne descende dans les rues de Paris pour s’émouvoir à grand bruit, quand la fonction de Président du peuple de France n’est à ce point plus protégée et que ce joyau de la république est dérobé mardi, quand d’autres trésors, fussent-ils prestigieux, le furent dimanche. 

Sébastien Mittelberger

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RAPHAËL GLUCKSMANN : UNE FRANCE SOUVERAINE POUR UNE EUROPE SOUVERAINE.
Le député européen et co-président de place Publique devint Isérois vendredi afin de marquer son soutien au projet EXALIA, propre à revitaliser une partie du site Vencorex et pour soutenir la candidature de Romain Gentil, candidat Grenoble Capitale Citoyenne-Place Publique aux prochaines élections municipales à Grenoble. L’occasion de parler de liens. Entre l’Europe et la France, entre l’Europe et nos territoires, mais aussi de la joie que l’exercice de la politique procure quand elle permet de défendre des idées plus grandes que soi.
Le propos européen a-t-il une portée auprès des échelons municipaux et intercommunaux ? Raphaël Glucksmann "J’étais ce jour sur la plateforme chimique de Vencorex ainsi qu’avec des représentants de Ferropem. La situation dramatique que travers la filière chimique est étroitement liée aux questions européennes. Quand nous parlons de commerce international, de relations à la Chine, nous parlons de nos usines, de nos industries. Qui menace aujourd’hui la filière du silicium, sur notre territoire sinon la concurrence absolument déloyale de la Chine. Une concurrence qui n’est pas seulement une concurrence de marché mais une stratégie clairement définie par le Parti Communiste chinois résolument décidée à écraser les productions européennes en utilisant des personnels réduits à l’esclavage sur les chaines de production du silicium, les ouigours, en subventionnant cette production jusqu’à la vendre à perte dans le but de détruire les productions européennes. L’Europe est ainsi la victime d’une stratégie géopolitique, bien au-delà d’une logique commerciale classique. Et donc, à vous répondre, quand nous parlons de ce rapport de force géopolitique, nous parlons de nos industries et quand nous parlons de ces industries, nous parlons forcément de nos territoires, nous parlons forcément de Vencorex. La politique c’est de montrer que ce qui a un impact sur la vie de chacun et de chacune et les décisions prises à l’échelle de la nation et de l’Europe sont étroitement liées. Je pense que nous devons renouer ce lien, ce fil, ce sens. Il faut équilibrer la politique, dans la pensée, le propos et l’action afin qu’elle se nourrisse à la fois de la vision générale et de ses applications, ces impacts, ses conséquences en prises directes avec le quotidien des populations. Il est impératif de lier les deux approches, comme deux focales, à la fois macro et micro". Il n'y a pas de France forte sans une Europe forte.Raphaël Glucksmann Votre projet entend que la France soit la locomotive d’une Europe souveraine. Il n’y a pas d’Europe forte sans une France forte ? R.G. "Il est essentiel d’ajouter qu’il n’y a pas de France forte sans une Europe forte tant nos destins sont liés. Quand je défends l’Europe, c’est parce que j’ai la volonté que la France redevienne souveraine, actrice. Qu’elle maitrise à nouveau son destin, qu’elle le produise. La seule manière pour qu’elle y parvienne, c’est que la France soit la locomotive de l’affirmation d’une puissance européenne, elle-même souveraine. Je crois qu’au-delà d’être un désir, c’est un impératif car jusqu’ici, nous avons vécu à l’abris du parapluie américain. Un parapluie qui s’est refermé et si nous ne reprenons pas notre destin en main, nous allons nous faire piétiner. Il faut avoir un regard clair sur ce qui se passe sur la scène internationale. La guerre est aux portes de l’Europe avec les offensives russes, la Chine va nous imposer une dépendance économique et la Tech américaine se révèle prédatrice. Notre Europe n’a pas pour vocation d’être un musée pour touristes que sont oligarques russes, des notables américains, des émirs qataris ou des dignitaires du parti communiste chinois. Je pense également que le trumpisme dans lequel s’enfonce les USA est une opportunité pour nous de redevenir un pays leader sur la question des libertés et d’’une vision démocratique du monde".  Vous êtes, avec François-Xavier Bellamy très engagés dans le projet de la défense européenne ? R.G. "Avec François-Xavier Bellamy et au-delà de nos points de divergences qui sont nombreux, nous avions un objectif commun qui était de dire les fonds européens doivent bénéficier aux productions européennes. Plus loin, si l’Europe souhaite être souveraine, elle doit mettre en œuvre une capacité de défense autonome. Car c’est comme cela qu’on est une puissance. Ne pas déléguer sa sécurité notamment aux USA. Et donc, en faisant fi de nos différences, nous avons véritablement œuvré, contre les lobbys de l’industrie militaire américaine, contre l’administration américaine, contre les relais de l’administration américaine au sein des institutions européennes. Nous sommes parvenus à tenir bon, à démontrer que le parlement pouvait s’unir, à l’exception des Insoumis et de l’extrême droite qui ont voté contre cet acte de souveraineté européenne ou qui, selon les textes n’ont pas participé au vote. En creux, nous avons obtenu une victoire significative, celle que l’Europe s’affirme et cesse de refuser défendre ses intérêts stratégiques car : oui ! en tant qu’européen, on doit défendre les intérêts européens et ce, sur tous les terrains, sur tous les dossiers. Cette volonté, cette conviction à être dans une logique de défense de la souveraineté européenne constitue un véritable rempart aux populismes de toute sortes. Toutes ces luttes participent à faire émerger une conscience collective européenne. Quand la guerre s’est déclarée en Ukraine, l’ébranlement a été le même de Lisbonne à Tallinn. Le peuple européen existe, avec une conscience profonde et je pense que les élites politiques sont en retard par rapport au sentiment populaire sur cette question de l’appartenance européenne". Vous êtes également présent ici, à Grenoble, pour soutenir la campagne de Romain Gentil ? R.G. "A la fois, il s’agit de participer à la croissance de Place Publique et c’est aussi soutenir une initiative que je trouve démocratique et vraiment belle. Une démarche qui contribue à ce que je souhaite voir advenir, un retour à un rapport démocratique. À la fois dans la pratique du pouvoir d’Emmanuel Macron ces derniers temps, la verticalité des institutions françaises, il y a une trahison de l’esprit démocratique qui est au cœur de notre rapport au monde. Et d’une manière générale, une faiblesse de plus en plus inquiétante des démocraties occidentales. La démarche citoyenne et la manière avec laquelle ils construisent leur projet en rencontrant les Grenobloises et les Grenoblois afin de leur demander quels sont leurs envies, leurs besoins, ce à quoi la population aspire, ce qu’ils pensent sur des questions aussi diverses que la santé, la sécurité, la démocratie, la transition écologique, la vie économique ou encore l’industrie, c’est une manière de revitaliser la démocratie et je pense que c’est essentiel. En cela G2C et Romain Gentil montrent que nous ne sommes pas là uniquement pour défendre la démocratie contre l’extrême droite et toutes les autres formes de populisme mais également pour refonder cette démocratie et la plonger à nouveau dans une sorte de bain de jouvence".  Il serait faux de dire que l’exercice politique est seulement un sacrifice. C’est un sacerdoce et il important de dire, de communiquer sur le fait que défendre des idées qui sont plus grandes que nous-mêmes apportent une joie qui est celle de la sortie de soi alors que le modèle de société dans lequel nous évoluons aurait tendance à nous enfermer en nous-mêmes, ce qui représente à mes yeux l’antithèse de la République.Raphaël Glucksmann Quels sont les émotions personnelles que vos engagements vous procurent ? R.G. "Depuis des mois, je me rends dans les écoles, dans les hôpitaux, auprès des forces de l’ordre, avec les douanes. Je ressens une forme de vertige face à l’ampleur des transformations et de la tâche à accomplir. Paradoxalement, je ressens de la joie. J’observe que nous souffrons d’être dans une société de solitude et que, fort de ce constat, quand on croit dans les idées que nous défendons, quand on rencontre des gens qui partagent les idées qui sont les nôtres, cela procure une immense satisfaction. Il serait faux de dire que l’exercice politique est seulement un sacrifice. C’est un sacerdoce et il important de dire, de communiquer sur le fait que défendre des idées qui sont plus grandes que nous-mêmes apportent une joie qui est celle de la sortie de soi alors que le modèle de société dans lequel nous évoluons aurait tendance à nous enfermer en nous-mêmes, ce qui représente à mes yeux l’antithèse de la République. Nous sommes souvent dans l’atomisation, l’individualisation de tout.  Les livres de développement personnel ont remplacé les ouvrages de philosophie et de politique. Cette individualisation génère de la solitude et de la peur et un des rôles de la République, c’est justement la possibilité de construire du commun en sortant de soi-même. Quand les révolutionnaires français écrivaient la Déclaration de l’homme et du citoyen, ils distinguaient l’homme du citoyen car pour devenir un citoyen, nous sortons de notre propre individualité pour devenir ce citoyen et c’est cela qui permet l’engagement politique et cette sortie de soi provoque réellement de la joie".