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MAXIM HOMME

Maximin Ytournel, membre du conseil national et responsable des jeunes LR en Isère partage sa vision du monde, de l’Europe, de la France et enfin de Grenoble dans une interview sans langue de bois.

Par Sébastien Mittelberger

Pour vous, que représente l’engagement politique ?

À une époque où notre pays est menacé par une instabilité à la fois économique et plus largement mondiale, l’engagement représente une forme concrète de réaction. Une réaction aux événements.  Aujourd’hui on constate que, de nouveau, beaucoup de jeunes s’engagent dans la politique, s’intéressent à la chose publique.

Par le passé, notamment dans la période des trente glorieuses, notre pays rencontrait une certaine stabilité et les crises étaient bien lointaines de nos quotidiens ce qui permettait à chacun de vivre sans se soucier des problèmes internationaux, et de moins avoir la nécessité de s’engager alors que la période que nous traversons, émaillée de crises multiples, économiques, sanitaires, climatiques, ont des répercussions directes sur nos existences. 

L’engagement, c’est prendre l’action au corps. En pleine conscience et en pleine responsabilité citoyenne et individuelle au travers de ses convictions. 

Selon vous, quels sont actuellement les enjeux les plus importants ?

Il est nécessaire de s’interroger en effet sur la nature et la priorité des enjeux d’aujourd’hui. L’avenir présente bien des incertitudes. La crise sanitaire a bien-sûr pesée dans la situation internationale. De surcroit, un climat de récession global est perceptible de tous et avec des tensions diplomatiques prégnantes, en Ukraine, en Palestine, en Israël et maintenant en Iran. On observe également un retour fort du populisme qui est une réaction des peuples qui désirent reprendre leur souveraineté. Sans être alarmiste, cette période m’évoque celle des années trente avec cette insouciance qui était celle de l’entre-deux guerres avec cette légèreté, avec la conscience et les enseignements du passé mais également celle des risques à venir. Il convient d’ajouter à cela les enjeux liés à l’environnement et à la démographie, quand on sait que la population mondiale a été multipliée par 7 en un peu plus d’un siècle, avec l’impact que cela peut avoir sur le climat. Au reste, il faut prendre en compte le sujet de l’identité qui ne manque pas de déboucher sur les débordements communautaristes, notamment en France. 

L’Europe, dans le cadre de sa souveraineté, semble s’interroger sur bien des sujets. Selon vous, face à la souveraineté des pays qui la compose, l’Europe peut-elle répondre d’une seule voix ?

L’Europe est une invention magnifique. Une invention au service de la paix. Au service d’une union des peuples d’Europe afin de faire face aux hégémonies économiques des grandes puissances telles que la Chine et la Russie à l’est ou encore les États-Unis à l’ouest. 

Une fois cela posé, on ne peut pas ignorer nos différences et les intérêts qu’ont chaque pays à faire entendre leurs voix. C’est un débat qui s’est d’ailleurs posé lors des élections européennes de 2024, notamment sur l’agriculture ou bien des pays ont à souffrir d’une concurrence totalement déloyale au sein même de l’UE. Notamment en lien avec des disparités sociales avec un cout du travail très différent d’un pays à l’autre, encore une fois, au sein même de l’Union Européenne. Le devoir de chaque nation est de défendre son tissu économique. Ses entreprises, ses agriculteurs.

Selon moi, l’Union Européenne doit progresser significativement dans ce sens. Faire « commun » doit être sa priorité absolue même si j’ai bien conscience que cela relève d’une immense complexité.

Selon vous, ces deux plaques d’influence que sont la Russie et les États-Unis sont-elles bien gouvernées ?

Il est peut-être sage de revenir à une vision plutôt gaulliste afin de considérer comment se situe la France au milieu de ces équilibres mondiaux et de s’interroger sur la place que nous devons tenir face à l’Amérique et la Russie. Car nous ne devons pas être les vassaux ni de l’un ni de l’autre. 

Concernant le conflit qui oppose la Russie à l’Ukraine, la position de la France est courageuse dans une situation délicate. L’objectif n’étant pas d’humilier la Russie en la poussant dans ses retranchements tout en les amenant à quitter le sol ukrainien qui est un état souverain.

Toutefois, le rôle de la France est de veiller à l’équilibre global des choses et adopter une attitude qui consiste à sur sanctionner la Russie n’est pas une bonne attitude. Sur ce point précis, je pense qu’Emmanuel Macron maitrise bien la position de la France. Car il s’est exprimé au nom de la France mais également au nom de l’Europe. 

Donald Trump, quoi que l’on puisse penser du personnage, demeure une personnalité de premier plan et qui restera dans l’histoire, en étant élu à deux reprises. A conclure sur ce sujet, je suis certain qu’il faut poursuivre nos échanges constructifs et indispensables tant avec l’un qu’avec l’autre.

La France manque-t-elle de volonté souverainiste ?

Cela relève de deux problèmes. Un manque de culture collective. Chacun se renferme un peu sur lui-même et c’est vrai en matière de consommation comme dans d’autres domaines. Plus loin, il y a également le problème lié au pouvoir d’achat. Les produits Français sont souvent plus onéreux que d’autres produits importés. 

En votre qualité de membre des LR, comment avez-vous vécu la séquence des élections internes à votre formation politique ?

Nous avons eu l’honneur de rencontrer Bruno Retailleau dans son ministère de l’Intérieur, afin d’échanger avec lui sur les problèmes liés à la sécurité et au narcotrafic que nous rencontrons à Grenoble. 

A titre personnel, j’ai soutenu la candidature de Laurent Wauquiez. En rapport à son action sur la région bien-sûr mais également en lien avec son courage. 

Il est utile de se souvenir qu’à une époque ou l’UDR se dessinait, ou Éric Ciotti faisait alliance avec le Rassemblement National dans le dessein d’ambitions personnelles, où les LR étaient en situation d’implosion, Laurent Wauquiez n’a pas courbé l’échine et a décidé de partir à la tête des législatives.

Quant à son score à cette élection interne, il s’explique de façon assez simple. Bruno Retailleau, alors qu’il est ministre de l’Intérieur, est une personnalité extrêmement visible. Avec une exposition de chaque instant qui lui a permis de développer sa notoriété auprès d’un grand public qui ne le connaissait pour ainsi dire pas. Son émergence auprès de l’opinion publique est une réalité ce qui le menait en position idéale pour remporter cette primaire au sein de notre famille politique. 

Notons également que nous sommes passés de 40 000 à 120 000 adhérents en un peu plus d’une année. Les LR sont redevenus un grand parti politique, ce qui nous permet de retrouver une véritable dynamique, de gagner des élections partielles.

Face à la déferlante Retailleau, il n’y avait pas grand-chose à faire et finalement le score de Laurent Wauquiez, tenant compte du contexte, n’est pas si faible qu’il peut apparaitre. 

Vous évoquiez Éric Ciotti. Toutefois les scores qu’il a rassemblé lors de la primaire de 2021, en vue de la présidentielle semble dire des choses. Quelle est votre analyse sur ce sujet ?

Cela dit que les Républicains ont la nécessité de retrouver un curseur idéologique. Ce curseur nous manque depuis trop longtemps. Grace à Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau, qui sont sur une ligne politique assez proche, nous avons retrouvé ce curseur idéologique. 

Par le passé, quand des courants allaient de Xavier Bertrand à Éric Ciotti, il était parfois complexe de savoir si nous étions dans la même formation politique. 

Oui ! les électeurs de droite sont demandeurs d’une ligne. Conservatrice et qui privilégie l’identité française sur les plans culturels et idéologiques. Une ligne qui ne craint pas de dire les choses, de mettre des mots sur des maux. Jusque-là, seule la gauche pensait représenter le camp du bien et de la « bienpensance ». Et nous, en face, celui du pragmatisme, celui aussi du bon sens, certes plus cruel et plus dur. 

La droite, grâce à ce que vous nommez un « curseur idéologique » n’a-t-elle pas déserté la forme libérale pour se consacrer à des enjeux plus régaliens comme l’identité ou le conservatisme ?

En réalité, je ne crois pas que les deux soient en opposition. La ligne François Fillon, en 2017 sur les plans politiques, économiques, régaliens en était l’illustration. Il est possible d’avoir une ligne libérale, c’est d’ailleurs celle d’Emmanuel Macron, qui a siphonné une partie de l’électorat de droite avec cette ligne sur un centre-droit situé entre Renaissance et Horizons.

Une autre partie de notre électorat qui, sur le plan du régalien, sur des sujets conservateurs, identités, immigration, nous a quitté pour rejoindre les sirènes du Rassemblement National.

Constatons qu’il ne fallait pas nous enterrer trop vite car nous sommes la seule formation politique sérieuse à pouvoir proposer cette ligne qui pour moi est la meilleure et la seule en capacité de relever le pays.

La droite que représente Bruno Retailleau est ouvertement chrétienne. Vous retrouvez-vous également dans cette partie de son engagement ?

La République est bien-sûr et avant tout laïque et grâce à cela, nous vivons dans un pays qui permet à chacun et à chacune, quelles que soient ses croyances religieuses, de pouvoir l’exercer. Concernant ma foi personnelle, je suis un chrétien catholique, croyant et pratiquant. Cette croyance a un lien avec mon engagement politique puisque cela a un lien avec ma culture, avec celle de mon pays. La spiritualité que nous évoquons participe à mon engagement politique, elle le complète et cela contribue à me constituer. 

Alain Carignon a officialisé sa candidature. C’est une bonne nouvelle pour Grenoble ?

C’est une bonne nouvelle à double titre.

Pour une raison déjà très personnelle puisque mon premier engagement, lors de la campagne municipale de 2020 était à ses côtés. Une première expérience fondamentale et formatrice et qui m’a laissé d’excellents souvenirs. Alain Carignon est parvenu à laisser une trace incroyable dans le souvenir des Grenoblois. Et je suis toujours émerveillé d’entendre de nombreux habitants parler de la période où Alain Carignon était maire de cette ville avec beaucoup de nostalgie.

Quel regard posez-vous sur les deux mandats d’Éric Piolle ?

Eric Piolle est de mon point de vue celui qui aura divisé Grenoble. En opposant la voiture aux cyclistes, notamment. Même si je suis d’accord avec l’impulsion qu’il a donné à la sécurisation du réseau cyclable. Et puis au-delà de son dogmatisme, de son écologisme punitif, il y a eu ses prises de positions liées à l’extrême gauche qu’il a défendu. Cette extrême gauche qui a brulé deux gendarmeries, un pont et une église. Plus encore il y a cette démission permanente face à la sécurité, au narcotrafic qui relève d’une inaptitude de sa part à être confronté au réel. Pourtant il est évident que ces problèmes pourraient être en partie résolues avec des actions simples et finalement peu couteuses. Mais Éric Piolle, dont je reconnais volontiers l’intelligence, bloque tout débat pour des raisons politiques et profondément idéologiques. 

Donc ce que je retiens de ces deux mandats, c’est cette capacité à systématiquement diviser. 

Quel regard portez-vous sur l’échelon métropolitain ?

Un regard assurément plus positif que sur l’échelon municipal. Néanmoins, comme certainement beaucoup de gens, j’ai du mal à discerner ce qui a été réalisé à cet l’échelon métropolitain. Il y a encore et toujours beaucoup de flou à dissocier l’action municipale de l’action de la métropole. Cela manque souvent d’une réelle lisibilité. Pour ma part, je milite beaucoup pour la compétence municipale. Quel est véritablement le dispatch des compétences entre la ville et la métropole ? Peu d’habitants parviennent à l’appréhender de manière concrète. 

Pour les élections municipales à venir ?

Ce panorama, certes sophistiqué est une chance pour les électeurs Grenoblois. A date, il est normal et sain que chacun présente ses ambitions, ses idées, dans des couloirs politiques différents pour une offre politique très diversifiée. Grenoble est une ville qui historiquement est très politisée, très riche dans son intérêt pour le débat public. 

Concernant par exemple la candidature d’Hervé Gerbi et peut-être celle à venir d’Émilie Chalas, qui sont clairement des talents politiques, je préférerais qu’elles nous rejoignent mais je ne critique par leur action car ils ont des choses à proposer, des programmes qui s’appuient sur des idées et leurs personnalités incarnent le courage de leurs convictions. Viendra surement ensuite le temps des négociations mais pour l’heure, je suis content de voir que des profils de cette compétence s’impliquent et s’engagent pour Grenoble avec des visions et des propositions concrètes.

Selon vous, Alain Carignon peut-il l’emporter ?

Si je m’engage dans cette campagne, c’est parce que je crois à la victoire de ma famille politique. Plus loin, je pense qu’une élection municipale permet à ceux qui y participent d’influer sur le courant des choses. Chaque formation à la possibilité d’aller chercher des voix. Par les actions, par le programme mais aussi par une présence quotidienne auprès des Grenobloises et des Grenoblois. Souvent une élection municipale se joue avec des écarts de voix assez faible. Nous savons qu’il faut que la proposition soit innovante, collée à la réalité des besoins et des souhaits des citoyens. Alain Carignon, avec une vraie dynamique de premier tour et des alliances qui seront primordiales pour le second tour, peut clairement l’emporter.

Comment Alain Carignon peut-il augmenter son socle électoral ?

Il y a un phénomène d’érosion liée à ce qui sera douze années de mandat complétée par la désillusion engendrée par Éric Piolle et sa majorité. Des situations qui sont comparables à celles que nous avons vécu lors de la fin de l’ère Destot, en 2014. 

Il faut ajouter à cela la très française envie d’alternance. Cette volonté de tester d’autres politiques locales. Sur le terrain, lors de nombreux échanges avec des habitants, nous constatons que des personnes plutôt de gauche ont envie de nous rejoindre. C’est un signal fort qui nous amène à penser que ce socle peut s’élargir significativement et que nous pourrons dépasser les 30% au premier tour. 

Sur le plan national, votre famille politique devra-t-elle passer par un primaire pour l’élection présidentielle de 2027 ?

Il ne le faut pas ! 

D’abord parce que ça n’est pas dans notre culture, qui est historiquement plutôt verticale et hiérarchique. Il serait souhaitable qu’un leader naturel s’impose et arrive à mener tout le parti derrière lui en étant assez puissant pour dégager toute cette ferveur dont nous avons besoin. En tous cas, c’est ce que je souhaite à titre personnel. 

Pour 2027, j’ai envie de croire à la renaissance des vieux partis. Je pense au Parti Socialiste et à la ligne Glucksmann, qui est un axe modéré, centre gauche mais socialiste dans son ADN social-démocrate est capable de faire un score important. 

Nous, de notre côté, avec Bruno Retailleau ou un ou une autre somme en mesure d’incarner cette ligne conservatrice et libérale économiquement qui a fait la force programmatique de François Fillon en 2017. 

Je pense profondément que cette ligne là pour nous permettre de nous qualifier pour le second tour de l’élection présidentielle. 

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