Qu’est-ce qui différencie un premier mandat d’un second ?
J.P « Beaucoup de choses les distinguent. Dans un premier temps, il convient de souligner qu’une réélection est un moteur encore plus puissant que la première élection. Être réélu en 2020 m’a procuré un sentiment extrêmement fort de légitimité. Lors de la première élection, en 2014, je suis élu pour représenter l’alternative à une gouvernance qu’une partie de la population ne souhaitait plus, j’incarnais le changement. En 2020, nous sommes l’équipe sortante. Les habitants et les habitantes nous connaissent. Nous sommes en capacité de présenter un bilan, ce qui représente un vecteur d’adhésion beaucoup plus fort. Le temps de l’action publique est lent. Il faut en tenir compte quand on souhaite donner une inflexion, imprimer une marque de fabrique. Lors d’un deuxième mandat, ce temps-là est derrière nous et nous sommes immédiatement opérationnels puisque nous sommes dans la continuité de ce que nous avons commencé à engager. Plus loin, un maire n’est jamais rien sans le couple étroit qui le lie à son administration. Avoir la confiance absolue de ses agents est une garantie de la bonne mise en œuvre des décisions prises par le conseil municipal. Le deuxième mandat est un mandat ou l’efficacité est décuplée dans la capacité à traduire les projets et à les mettre en œuvre ».
Si les électeurs me font l’honneur de me confier un troisième mandat, je pense que nous passerons de bâtisseurs à protecteurs.
Julien Polat, maire de Voiron
Le troisième mandat sera différent ?
J.P « Si les électeurs me font l’honneur de me confier un troisième mandat, je pense que nous passerons de bâtisseurs à protecteurs. Jusque-là, il était nécessaire de poser des jalons, de concevoir des éléments structurants qui donnent une inflexion différente à Voiron. Aujourd’hui, l’enjeu me semble différent. La société est inquiète et les populations attendent sans doute de leurs maires qu’au-delà de s’occuper de la ville dans sa dimension infrastructurelle, la municipalité s’occupe des personnes aux sens littéral du terme. Mes enjeux seront notamment ceux liés à l’accès à la santé quand on sait la difficulté d’avoir aujourd’hui un médecin traitant de proximité alors que le contexte de démographie médicale est nationalement défavorable. La sécurité est également un sujet auquel il faut apporter des évolutions, des réponses. Je souhaite être en mesure de dire que dans tout ce qui préoccupe, qui inquiète une société qui est observatrice de ces phénomènes, Voiron, par le biais de l’action municipale, doit être au front de manière à préserver ses habitantes et ses habitants de tout ce qui peut être anxiogène ».
Quels ont été et quels sont les grands chantiers de Voiron ?
J.P « Le chantier de l’hôpital a été LE chantier du premier mandat. Nous risquions alors de perdre notre hôpital. Alors que je prenais mes fonctions de maire, en 2014, la collectivité n’était plus propriétaire des terrains sur lesquels l’hôpital devait être installé. Toutes les autorisations administratives et les permis de construire avaient été annulés par la justice et les conditions requises par l’État pour financer le projet n’étaient plus remplies. Toutefois, nous sommes parvenus à redresser la barre et l’hôpital a été livré aux premiers mois du deuxième mandat.
Le chantier emblématique de ce deuxième mandat a été le réaménagement du Mail. Ce quartier étant l’espace public stratégique de Voiron, situé entre le jardin de ville et notre église Saint-Bruno. C’est également la place du marché, un espace façonné par nos aïeux dans la deuxième partie du 19° siècle. Chemin faisant, il était hélas devenu, par l’essor de la voiture comme vecteur du déplacement individuel, un vaste parking à ciel ouvert. Ce faisant le Mail perdait toute sa dynamique d’animation. A l’aune de ce que sont devenus les transitions, notamment écologiques, il fallait imaginer un espace revégétalisé, piétonisé mais également installer des mobilités favorables aux bandes cyclables. L’enjeu était de rééquilibrer l’occupation de l’espace public tout en conservant des espaces qualifiés et mesurés pour l’automobile. La voiture devant moins cannibaliser l’espace public mais doit conserver sa place. Voiron n’est pas équipé de tramway et il est capital que les gens de l’extérieur puissent venir à Voiron facilement. A cet effet, nous avons créé des parkings avant de supprimer des places de stationnements sur l’espace public. Ce projet du Mail s’inscrit dans une vision générale du centre-ville avec une réorganisation des équilibres des mobilités et des enjeux liés à la qualité de vie mais également au bon fonctionnement des commerces ».
En mars 2026, cela fera 12 ans que vous êtes maire de Voiron. Toujours pas de lassitude ?
J.P « Il est effectivement fondamental de se poser la question. Avant d’affermir ma décision d’être candidat à ma succession pour un troisième mandat, j’ai procédé à un vrai travail d’introspection afin de m’interroger sur ce sujet. A savoir si mes ressorts n’étaient pas détendus, savoir si je n’étais pas prisonnier d’une logique routinière, si en somme je n’avais pas perdu le feu intérieur. Si finalement j’étais encore la meilleure personne, la mieux placée pour incarner ce que je portais au départ. Il faut admettre que nous sommes souvent les moins bien placés pour être lucide sur ces sujets si personnels. Mais après presque 12 ans d’exercice et même si je ne m’habitue pas au temps de l’action publique, à la pesanteur administrative et réglementaire, je reste passionné par ce que je fais. J’aime cette ville, j’aime ce territoire, indissociable de Voiron, j’aime cette population qui chaque jour constitue Voiron et je suis très fier de travailler à leur service. Mon enthousiasme est intact, il est celui des premiers jours de mon premier mandat ».
Selon vous, la fonction de maire a-t-elle changée depuis 2014 ?
J.P « Notre responsabilité de maire est plus lourde que par le passé. La crise sanitaire mais aussi ce que nous constatons actuellement avec l’expression criante de la faillite de la politique nationale influent sur l’importance des territoires et des élus de proximité. Ce maillage territorial est le garant du bon fonctionnement de notre pays et ce, même sur des champs régaliens. Pour exemple, quand il s’agissait de distribuer des masques, durant la crise sanitaire ou d’assurer la couverture vaccinale, chacun a pu constater à quel point les territoires avaient joué un rôle essentiel avec notamment une réactivité de chaque instant. Une situation qui liait alors sécurité et santé de nos concitoyens et ou les collectivités locales ont joué un rôle absolument majeur, dans une séquence inédite. Sur la plan économique, les élus locaux ont démontré, encore une fois, la force de leur pragmatisme ».
Quid de la CAPV ?
J.P « De la même manière que pour la Métropole de Grenoble, la ville centre est victime du même phénomène de perception. Une perception qui entraine la tentation de rejeter par principe pour les petites communes la ville-centre dans l’idée qu’elle cumulerait les pouvoirs et serait prédatrice. J’ai pu le constater en 2020, lors des élections communautaires ou j’ai été battu par le maire de Voissant, commune la plus petite du Pays Voironnais. Mais de cette élection, Bruno Cattin et moi avons su tirer le meilleur, pour l’intérêt général de la population du Pays Voironnais. Il n’était pas question d’entrer en conflit pour de mauvaises raisons. Ces combats ne sont pas de mon gout. Le vote communautaire est démocratique. Il faut en accepter les règles, que les séquences s’illustrent par des victoires ou qu’elles connaissent d’autres issues ».
Serez-vous candidat à l’élection communautaire de 2026 ?
J.P « Non. J’ai tiré les leçons de celle de 2020. Je ne me relancerai dans ce combat. Cette élection pour le Pays Voironnais se fera sur la base du corps électoral qui sera issu des élections municipales de 2026. Un corps électoral qui va certainement connaitre des mouvements et je serai confronté au même phénomène que lors de l’élection communautaire de 2020 ».
Quel est votre rôle au sein du Conseil Départemental ?
J.P « Je suis vice-président, en charge des finances et de la contractualisation. J’aime ce mandat au département car c’est la collectivité des proximités par excellence et le chef de file des solidarités. Nous sommes au service de la population de manière très concrète et des plus vulnérables en premier lieu sur tout ce qui relève de la protection de l’enfance, de l’autonomie, du handicap, de l’insertion avec des moyens d’agir, avec un budget d’1,6 milliard d’euros, qui contribue grandement à l’aménagement du territoire. Plus encore, je ressens un réel plaisir à travailler aux côtés de Jean-Pierre Barbier car il est un Président qui offre une sécurité à tous ceux qui l’entourent par sa fiabilité, son implication et sa connaissance encyclopédique des dossiers. Si je suis passionné par ce mandat, c’est aussi par son lien à ce territoire, d’une immense richesse. J’en parle d’ailleurs avec la ferveur des convertis puisque je suis natif du nord de la France (Pas de Calais). Originellement, j’ai pu aborder le pays voironnais par Moirans ou j’ai eu le privilège de travailler auprès de Gerard Simonet, alors maire de la commune, avant bien-sûr d’unir mon destin à celui des voironnaises et des voironnais. Donc à bien des égards, je suis très heureux d’avoir choisi ce territoire comme celui dans lequel je ferai ma vie et je me considère aujourd’hui investis du devoir d’en faire prospérer les atouts qui ont su me séduire ».
Vous ne souhaitez pas briguer de mandats nationaux ?
J.P « Je pense que j’aurais aimé, à l’époque où cela était possible, envisager d’être député maire. Je reste convaincu que la capacité à façonner le territoire et sans y renoncer, à concourir, à participer aux grands enjeux de la nation était une bonne chose. En creux, je pense que c’est un appauvrissement significatif de la vie politique que d’avoir créé une barrière entre ces deux mandats. Mais dès lors que nous sommes condamnés à faire un choix, pour rien au monde je ne veux renoncer à ce que j’exerce ici, à Voiron ».
Plus LR de carte mais toujours de cœur ?
J.P « Je ne suis effectivement plus membre des LR depuis près de 8 ans. Je ne renie rien de ce que sont mes valeurs, de ce que je dois au parti. Je suis parti calmement, sans pertes ni fracas. Car je n’avais de comptes à régler avec personne. Simplement la segmentation que provoque l’organisation partisane de la vie politique ne me convient plus. Les partis politiques sont selon moi indispensables à l’organisation de la démocratie mais ils doivent demeurer des outils de cette démocratie et en creux de la République et uniquement cela, dans le respect de leurs courants de pensée bien-sûr. L’intérêt des partis politiques ne doit jamais prendre le pas sur l’intérêt du pays, c’est en cela que j’ai finis par ne plus m’y retrouver. Qui plus est, être maire ne relève pas d’un quelconque partisanisme. Je suis le maire de tous les voironnais et les voironnaises, et pas seulement de ceux qui ont voté pour moi ».
Quels sont les émotions que vous procurent votre mandat de maire ?
J.P « Je ressens une certaine plénitude à ne pas avoir de doute quand je me réveille le matin sur le fait d’être utile. A servir la population, à voir le fruit de ce que l’on façonne pour le territoire, à générer des dynamiques, à mettre en œuvre des projets que l’on peut toucher de manière très concrète. Le mandat de maire offre cette possibilité incroyable de servir et de donner un sens extraordinaire à son existence. C’est aussi le bonheur de croiser des gens qui vont avoir à mon endroit un mot gentil, une réflexion encourageante. Cela contribue à se sentir aimé, sentiment dont chacun d’entre-nous a besoin. Le mandat de maire est une relation presque charnelle entre l’élu et les habitants ».
Le mandat de maire est une relation presque charnelle entre l’élu et les habitants ».
Julien Polat, maire de Voiron
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