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GAZA…OUI! QUAND LA PALESTINE EST EN ISRAEL ET ISRAEL EN PALESTINE

Emmanuel Macron a concrétisé sa promesse de reconnaitre un État palestinien, depuis New York, lors de l’Assemblée générale des Nations Unies. Jugeant ainsi que cette reconnaissance est la seule manière d’en finir avec ce conflit tout en constatant que la solution militaire est inefficace à démanteler le Hamas.

Par Sébastien Mittelberger

FRENCH TOUCH

La France est gourmande et métaphysique. Son peuple toujours prêt à remettre son histoire en perspective, prompt à prendre à bras le corps les causes lointaines et périlleuses. Le conflit israélo-palestinien et le devenir de la Palestine n’échappe pas à cette tradition tant il incarne le symbole de ce combat de l’oppresseur contre l’oppressé, du nanti contre le défavorisé, du riche contre le pauvre et peut-être du blanc contre celui qui peut l’être un peu moins. Des luttes en phase avec notre histoire, dreyfusardes et antidreyfusardes, ou pointait déjà la question identitaire, bien au-delà du volet judiciaire de l’affaire. Un peuple de France qui sait toujours placer la question de l’universel au sein du débat national. Pour cette raison également, le peuple de France est un grand peuple. 

GAUCHE ADROITE

En lice sur notre sol, la droite décomplexée, souverainiste et vigilante à freiner la montée des (du) communautarismes, naturellement pro Israël, porte étendard d’une lutte occident-orient. A l’opposé, la gauche qui, dans son ensemble, fait de la reconnaissance du destin de la Palestine un symbole antiraciste, pointant la politique menée par Netanyahou comme une filiale de la holding identitaire, qu’elle juge en crue dans notre pays. Cette gauche est quant à elle, le porte fanion de cette même lutte, mais inversée, orient-occident. Si toutes les droites et les gauches françaises ne figurent pas dans cet inventaire, c’est que celles manquant à l’appel naviguent en des eaux libérales, progressistes ou sociales-démocrates mais hors de portée des enjeux identitaires.  

L’agenda politique impose à La France d’entrer dans une séquence électorale d’une grande intensité avec trois scrutins majeurs (élections municipales, présidentielle, législatives) en un peu plus d’une année (mars 2026-juin 2027). Il y a fort à parier que les formations politiques radicales feront des questions liées à l’identité un axe central, s’emparant des destins du monde en utilisant le tumulte sévissant en Israël comme en Palestine pour mobiliser les électorats à des objectifs tout autant idéologiques que parfois clientélistes. Car si la question de la reconnaissance de la Palestine en tant qu’État met en avant le sujet subtil de la souveraineté même si celui-ci tente de s’opposer au souverainisme, elle poursuit de mettre en perspective cette question du vivre-ensemble, ailleurs, partout, comme ici, surtout, comme un écho, une démonstration, une preuve.  

JERUSAL’AIME

Mais le destin de la Palestine, au-delà d’agiter le panorama politique français, joue peut-être un nouvel épisode de son destin, si toutefois le processus de création de cet état devait aller à son terme, comme le souhaite une majorité des états membres de l’ONU. Un nouvel épisode, donc, pour une série dont les saisons furent multiples sans jamais aboutir à un dénouement autre que stérile. Une saga qui débute en 1920, au sortir de la première guerre mondiale, avec l’effondrement de l’empire ottoman au profit d’une Angleterre triomphante et encombrée du mandat palestinien, délivré par une SDN (Société Des Nations, forme originelle de l’ONU) qui n’a pas le poids actuel et dans une partie du globe à laquelle l’empire britannique ne comprend pas grand-chose.

L’issue de la seconde guerre mondiale oblige les puissances occidentales à payer au peuple juif la dette honteuse et infamante de la Shoah et de placer l’état d’Israël dans cette partie du monde, cernée par des nations presqu’exclusivement musulmanes, naturellement rétives à la présence d’un état majoritairement juif. S’en suivirent d’inévitables conflits dès 1948, ou la paix relève de l’accessoire et la guerre, du principal. Des combats à répétition qui eurent comme conséquence d’aiguiser les haines et les provocations quand on devine la prégnance des religions au Proche et au Moyen-Orient, quand on sait que les religions sont pourtant les organisations politiques et sociales de la foi. Il parait alors bien illusoire et angélique de croire que juifs et arabes puissent s’entendre, plus encore quand ce sont des instances majoritairement catholiques qui ont la charge d’en arbitrer les destins.

OSLO BEACH

Dernier opus en date, les fameux accords d’Oslo, orchestrés en 1993 par les grandes puissances occidentales, Bill Clinton en tête, tenant au même pupitre les dirigeants des deux camps, soit un ancien militaire (Yitzhak Rabin) et un ténor terroriste (Yasser Arafat). Des accords qui reviendraient à opposer une équipe de footballeurs à une équipe de rugbymans, se disputant, sur un cours de tennis, une balle de golf et dont l’arbitre serait issu d’une compétition hippique. Des accords cosmétiques et sans réel calendrier d’application, réduits à néant après l’assassinat à Tel Aviv d’Yitzhak Rabin, en novembre 1995. 

GUERRE ET PAIX

L’obsession du vivre ensemble née des hystéries mondialistes poussent des nations en paix et temporairement unis garce aux traumatismes laissés en nos mémoires collectives par deux conflits mondiaux et incroyablement meurtriers à ne pas comprendre que des civilisations, des mondes, différents culturellement, puissent encore s’affronter. Dans notre monde ou la paix doit faire loi, la guerre n’a plus de place au point de croire, avec le recours à un évangélisme forcené, que des choses complexes sont simples. A cette discipline béate, le retour d’expérience des printemps arabes ne semble pas nous avoir servi de leçon. Il ne serait pourtant pas vain de s’interroger sur ce que sont devenus la Lybie d’après Kadhafi, l’Irak post Saddam Hussein et plus récemment la Syrie d’après Bachar el Assad. Des nations prospères, propices aux développements économiques ou règnent enfin des démocraties enclines au respect des droit des femmes et des hommes ou des théâtres délaissés aux plus violents des obscurantismes quand nos passions tristes et confortables préfèrent arborer le drapeau ukrainien sur nos profils Facebook ou celui de la Palestine aux frontons de certaines de nos mairies, drapés dans le même drap que celui de nos dignités du moment ? 

FACON PUZZLE

Alors à l’heure des villes monde et des pays continents, quand le PIB de New York est équivalent à celui de l’Espagne, il faut s’occuper à trouver du sens au découpage d’un territoire de 6000 KM2 pour une population de 5 millions d’habitants, localisé dans une poudrière qui demeurera une poudrière, quel que soit l’habillage de la jeune épouse, fusse-t-elle mal mariée par une union contre nature. Car il est bien chimérique de croire qu’une reconnaissance de la Palestine par les Nations Unies placerait sous silence Israël et sa Knesset. Un parlement israélien, rompu aux tractations de tous genres et qui déjà négocie des pourcentages de la Cisjordanie et l’annexion de la Judée-Samarie, microrégion dont nombre d’entre-nous ignoraient l’existence il y a quelques minutes encore. 

IT IS NOT A LOVE SONG

Au-delà de la détermination des peuples à être souverains, devenir un état relève bien plus d’un cadre juridique que du champ des émotions et en la matière, reconnaissons que la trajectoire palestinienne, au-delà de la volonté de son peuple, pour peu d’ailleurs qu’il soit uni, risque de laisser encore bien longtemps les juristes et les cartographes des états membres des Nations Unis à leurs travaux nocturnes. Alors, un état Palestinien ? Pourquoi pas. Mais avec quelles autorités gouvernementales palestiniennes faudra-t-il traiter ? Celles, affaiblies, née des accords d’Oslo ou bien encore avec des responsables du Hamas, troquant pour l’occasion le treillis militaire au profit du costume ministériel ?

Sur quelle base territoriale ?  Faudra-t-il se référer aux frontières établies en 1967 ou en envisager d’autres, avec des voisins pour le moment silencieux ? Pour le moment seulement…

Quelle place prendra l’Amérique de Donald Trump, souvent sourde aux gesticulations d’une ONU qu’elle considère comme une réunion de copropriétaires, dans la constitution de ce gâteau ? 

La création d’un état palestinien serait-elle l’assurance d’une paix durable dans cette partie du monde et cela suffira-t-il à apaiser les humeurs d’un Iran belliqueux, d’un Hezbollah hypermnésique et d’un Israël toujours prêt à en découdre avec ses voisins arabes ? Et cette Palestine nouvelle sera-t-elle une oasis de paix ou demeurera-t-elle ce qu’elle est déjà : le réceptacle confus et opaque du terrorisme pluriel ?

Autant de questions au milieu de centaines d’autres pour la création d’une Palestine au peuple dispersé, fracturé, sans unité, pouvant payer ses cigarettes avec trois monnaies différentes. 

Mais alors que se termine l’Assemblée des Nations Unies et que la nuit domine sur Time Square, nous oublierons le destin des Gazaouis comme les noms des otages israéliens, comme ceux des villages meurtris du Soudan et de l’Érythrée, comme nous avons oublié la Crimée, Marioupol, Boutcha ou la localisation précise d’Odessa. 

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